• Suite de la correspondance de la famille de Condé de 74 à 90.

    L'enlèvement du duc d'Enghien.

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    74. Dusoulier à Contye.15 mars 1804.
    « Je crois devoir vous mander l'affligeante nouvelle de l'enlèvement de monseigneur le duc d'Enghien, qui vient d'avoir lieu ici... Cette nuit, il est arrivé ici une troupe de gendarmes français, quelques cavaliers, il y avait aussi de l'infanterie, qui a passé le Rhin à une lieue et demie d'ici, lesquels a investi d'abord la ville, puis les maisons où ils ont voulu faire leurs arrestations. À cinq heures, ils ont pris S. A., le sieur Jacques, son secrétaire des commandements, le baron de Grünstein, son aide de camp, le marquis de Thumery, maréchal de camp, le sieur Schmitt, autrefois officier au régiment d'Enghien. Le chef de la troupe a dit n'avoir point d'ordre pour arrêter la princesse Charlotte de Rohan. Il n'a pas été question de son père, monsieur le prince de Rochefort. Je ne conçois pas encore comment monsieur de Corbier et moi n'avons pas été aussi enlevés. Il paraît jusqu'ici que l'autorité de monseigneur l'Electeur est entièrement violée. Quelques gens de S. A. ont aussi été arrêtés. Ses papiers ont été saisis. Comme ce que je vous mande, monsieur, vient de se passer, puisqu'il n'y a pas plus d'une heure qu'ils sont partis, j'attendrai le retour de personnes qui ont été à leur suite pour ajouter à ce récit, s'il y avait quelque chose de plus de su, d'ici au départ du courrier.
    <o:p>  </o:p>Ce 17 mars.
    J'en étais resté là de ma lettre, monsieur, quand, sur des avis réitérés, j'ai cru devoir penser à ma sûreté. En conséquence, j'ai été coucher à quelque distance d'ici, et, ayant eu hier des avis certains que S. A., conduite par toute la troupe, avait repassé le Rhin, j'ai cru pouvoir revenir à mon domicile et y continuer mon récit.
    Il a, de plus, été arrêté ici le grand vicaire de l'évêché de Strasbourg pour la partie de la droite du Rhin, et un abbé qui lui servait de secrétaire. Les gens de S. A. arrêtés sont :
    Son valet de chambre Féron, son premier valet de pied le grand joseph et le nommé Poulain, son officier. Il reste ici son cuisinier, un petit polonais dont il avait fait un valet de pied, et trois palefreniers dont un est le frère de Poulain.
    Il y avait déjà quelques jours que l'on devait avoir quelques inquiétudes, parce que nous avons su qu'il était venu à Offenburg des gendarmes pour y arrêter une madame la baronne de Reich, cousine de monsieur de Würmser ; et, le bailli s'y étant opposé au nom de monseigneur l'Electeur, ils y sont demeurés un ou deux jours. Je pense que ce n'a été que pour détourner l'attention de ce côté-ci.
    À présent que le coup est fait, j'apprends que monseigneur avait tant d'inquiétudes qu'il faisait coucher et Grünstein et Schmitt chez lui. Ce qu'il y a de certains, c'est qu'il en a bien gardé le secret. Je suis sûr que monsieur de Thumery, Jacques, monsieur de Corbier et moi n'en avons rien su que depuis leur départ.
    .. Il est venu ici, hier, un chambellan de S. M. le Roi de Suède, qui paraissait envoyé pour donner quelque avis à S. A. ; mais il était trop tard. Il a témoigné que S. M. et S. A Electorale apprendrait cet événement avec douleur. Je peux aussi vous dire qu'on a peu pris de papiers de S. A et que, par conséquent, on en voulait plus à sa personne qu'à sa correspondance... Des raisons fortes nous font présumer qu'une partie des troupes qui sont venues ici auraient bien voulu n'y trouver personne. Nous ne devons de n'avoir pas été arrêtés,qu'à la présence d'esprit et à la bonne volonté du prévôt, à qui le général a demandé s'il y avait d'autres émigrés, lequel a dit qu'il n'en connaissait pas d'autres. J'ai la certitude qu'on n'a rien fait à Freiburg. Le baron d'Ichtersheim, chez lequel logeait S. A., a été d'abord arrêté ; mais sur l'assurance qu'a donnée un officier de ces troupes, qui a logé chez lui en 1796, qu'il était domicilié ici, il a été relâché sur le champ. Les gens de la ville, magistrats, ont mis sur les affaires de S. A. les scellés. Tout le monde ici est au désespoir de n'avoir pas connu les craintes de monseigneur ; il me paraît qu'il eût été pris des moyens pour faciliter son évasion... »

    <o:p> </o:p>75. Charlot à Moncey.15 mars 1804.
    Mon général, il y a deux heures que je suis rentré en cette ville de l'expédition sur Ettenheim (Electorat de Baden), où j'ai enlevé, sous les ordres des généraux Ordener et Fririon, avec un détachement de gendarmerie et une partie du 22° de dragons, les personnages dont les noms suivent :
    1° Louis-Antoine-Henri de Bourbon, duc d'Enghien ;
    2° Le général marquis de Thumery ;
    3° Le colonel baron de Grünstein ;
    4° Le lieutenant Schmitt ;
    5° L'abbé Weinborn, ancien promoteur de l'évêché de Strasbourg ;
    6° L'abbé Michel, secrétaire de l'abbé Weinborn ; ce dernier est français comme Weinborn ;
    7° Un nommé Jacques, secrétaire du duc d'Enghien ;
    8°Ferrand (Simon), valet de chambre du duc ;
    9° Poulin (Pierre), domestique du duc ;
    10° Joseph Canone, idem.
    Le général Dumouriez, qu'on disait être logé avec le colonel Grünstein, n'est autre chose que le marquis de Thumery, désigné ci-dessus, et qui occupait une chambre au rez-de-chaussée dans la même maison qu'habitait le colonel Grünstein, que j'ai arrêté chez le duc où il avait couché. Si j'ai aujourd'hui l'honneur de vous écrire, c'est à ce dernier que je le dois. Le duc ayant été prévenu qu'on cernait son logement, sauta sur son fusil à deux coups, et me coucha en joue au moment où je sommais plusieurs personnes, qui étaient aux fenêtres du duc, de me faire ouvrir ou que j'allais de vive force enlever le duc ; le colonel Grünstein l'empêcha de faire feu en lui disant :
    « Monseigneur, vous êtes-vous compromis ? »
    Ce dernier lui ayant répondu négativement : «  Eh bien ! Lui dit Grünstein, toute résistance devient inutile ; nous sommes cernés, et j'aperçois beaucoup de baïonnettes ; il paraît que c'est le commandant : songez qu'en le tuant, vous vous perdriez et nous aussi. » Je me rappelle fort bien d'avoir entendu dire : « C'est le commandant » ; mais j'étais loin de penser que j'étais sur le point de finir, ainsi que le duc me l'a déclaré et me le répéta encore. Au moment de l'arrestation du duc, j'entends crier : « Au feu » (médiocre allemand) ! Je me porte sur le champ à la maison où je comptais enlever Dumouriez ; et, chemin faisant, j'entends sur divers points répéter le cri : «  Au feu !!» J'empêche un individu de se porter vers l'église, probablement pour y sonner le tocsin, et je rassure en même temps les habitants du lieu qui sortaient de leurs maisons, tout effarés, en leur disant : « C'est convenu avec votre souverain », assurance que j'avais déjà donnée à son grand veneur, qui, aux premiers cris, s'était porté vers le logement du duc. Arrivé à la maison où je comptais enlever Dumouriez, j'ai arrêté le marquis de Thumery. Je l'ai trouvée dans un calme qui m'a rassuré, et investie telle que je l'avais laissée avant de me transporter chez le duc.
    Les autres arrestations ont été opérées sans bruit, et j'ai pris des renseignements pour savoir si Dumouriez avait paru à Ettenheim ; on m'a assuré que non ; et je présume qu'on ne l'y a supposé qu'en confondant son nom avec celui du général Thumery.
    Demain je m'occuperai des papiers que j'ai enlevés à la hâte chez les prisonniers ; et j'aurai ensuite l'honneur de vous en faire mon rapport.
    Je ne puis trop donner d'éloge à la conduite ferme et distinguée du maréchal des logis Pfersdorf dans cette circonstance. C'est lui que j'ai envoyé la veille à Ettenheim, et qui m'a désigné le logement de nos prisonniers ; c'est lui qui a placé en ma présence toutes les vedettes aux issues des maisons qu'ils occupaient, et qu'il avait reconnu la veille. Au moment où je sommais le duc de se rendre mon prisonnier, Pfersdorf, à la tête de quelques gendarmes et dragons du 22° régiment, pénétrait dans la maison par le derrière, en franchissant les murs de la cour : ce sont ceux qui ont été aperçus par le colonel Grünstein, ce qui a déterminé ce dernier à empêcher le duc de faire feu sur moi. Je vous demande, mon général, le brevet de lieutenant pour le maréchal des logis Pfersdorf, à l'emploi duquel il a été proposé à la dernière revue de l'inspecteur général Virion. Il est, sous tous les rapports, susceptible d'être porté à ce grade. Les généraux Ordener et Caulaincourt vous parleront de ce sous-officier, et ce qu'ils vous diront sur son compte me fait espérer que vous prendrez, mon général, en sérieuse considération la demande que je vous fais en sa faveur. J'ai à ajouter que ce sous-officier m'a rendu compte qu'il avait été particulièrement secondé par le gendarme Henn (Brigade de Barr). Pfersdorf parlant plusieurs langues, je souhaiterais que son avancement ne l'enlevât point à l'escadron.
    Le duc d'Enghien m'a assuré que Dumouriez n'était point venu à Ettenheim ; qu'il serait cependant possible qu'il eût été chargé de lui apporter des instructions de l'Angleterre ; mais qu'il ne l'aurait pas reçu, parce qu'il était au-dessous de son rang d'avoir affaire à de pareilles gens ; qu'il estimait Bonaparte comme un grand homme, mais qu'étant prince de la famille Bourbon, il lui avait voué une haine implacable ainsi qu'aux Français, auxquels il ferait la guerre dans toutes les occasions.
    Il craint extrêmement d'être conduit à Paris, et je crois que pour l'y conduire, il faudra établir sur lui une grande surveillance. Il attend que le Premier Consul le fera enfermer, et dit qu'il se repent de n'avoir pas tiré sur moi, ce qui aurait décidé de son sort par les armes. »

    <o:p>  </o:p>76. Thumery à Contye.14 avril 1805.
    « ...Monsieur Schmitt, mon camarade d'infortune, me prie de le rappeler dans votre souvenir. Il vous recommande ses intérêts. Le pauvre diable n'a que sa pension pour subsister ; il n'a plus de ressources que moi....
    Poulain vous rendra compte du malheureux événement du 15 mars. Il vous confirmera, ce que je vous ai déjà dit, que l'on m'a caché en totalité les justes craintes que l'on devait avoir sur sa personne. Monseigneur même ne les ignorait point, puisqu'il avait pris des précautions dans son intérieur, depuis deux jours, pour repousser la force par la force. Cette précaution prouve assez qu'il avait eu des avis que l'on voulait l'enlever. Il n'en a été fait part qu'à deux ou trois individus, qui ont malheureusement gardé le secret. Voilà ce qui a causé sa perte. Un mot que l'on m'aurait dit, j'ose croire qu'il était sauvé. La veille de ce lugubre jour, j'ai chassé avec lui jusqu'à huit heures du soir. Rentré chez moi, je ne suis plus sorti, et l'on m'a pris dans mon lit, ne me doutant de rien : il faut convenir, mon cher ami, que j'ai été la victime bien innocente dans cette malheureuse affaire. Il y avait cent manières de sauver ce misérable prince, et il n'y en avait qu'une pour l'enlever, faute d'avoir dit seulement une parole. Je trouve que les personnes qui ont gardé ce fatal secret ont fait une grande faute à mes yeux, encore plus grande de n'avoir pris aucune précaution pour prévenir ce malheur. Je sais que, dans les premiers moments de son arrestation, l'on a cru que j'étais du nombre de ceux qui étais instruit des avis qu'il avait reçus. La manière dont il avait la bonté de me traiter le faisait croire ; mais il n'en était rien.  J'avais d'autant plus lieu de l'espérer, cette confiance de sa part, que sa personne était en danger et qu'il le savait. Il m'a dit là-dessus des choses qui m'ont prouvé ses regrets de ne m'avoir pas mis dans sa confidence ; mais il n'était plus temps. J'ose croire que celui qui avait fait son avant-garde, où il n'a pas éprouvé aucune surprise, aurait eu le talent de le garder une nuit... »

    <o:p>  </o:p>77. Relation du curé de Vincennes.12 mars 1816.
    « Monseigneur le duc d'Enghien est entré au château de Vincennes le 21 mars, vers cinq heures après-midi, sous le nom de « l'Inconnu ». Le commandant Harel l'a reçu et mis dans une chambre qui, sans être faite pour un prince, était décemment meublée. Il était exténué de fatigue, n'ayant pas mangé depuis vingt-six heures. Le commandant lui fit servir un dîner passable par le restaurateur Mavré, qui demanda 7 à 8fr. Son Altesse mangea peu. Elle témoigna le désir qu'elle avait pour la chasse et la lecture, promettant au commandant que, si la première lui était accordée, elle l'assurait de chasser fidèlement avec lui et de ne point chercher à s'évader. Le sommeil tourmentait le prince ; mais il ne pouvait s'y livrer. Il réfléchissait donc sur sa triste position, lorsque tout à coup il entend un bruit sourd qui lui annonçait que quelques personnes s'avançaient vers lui : c'était le commandant et deux gendarmes. On lui commanda de suivre : il obéit. Il est transféré dans l'appartement du commandant, où le prétendu conseil de guerre était assemblé. Il est mis dans une chambre voisine où reposait la femme du commandant, qui n'était séparée de l'auguste prisonnier que par un paravent. Il avait pour garde un officier de gendarmerie, avec lequel il s'entretint sur différentes choses. Il lui fit plusieurs questions, entre autres depuis quand il servait ; s'il était entré au service comme simple soldat ; s'il servait avec plaisir.
    « Y a-t-il un prêtre dans le château ? » demanda-t-il. Réponse négative.
    « Mais le curé de la paroisse ne vient-il jamais ici, et ne me permettrait-on pas de le voir ? ».
    « Je l'ignore », dit l'officier.
    « Êtes-vous un homme d'honneur, et puis-je compter que vous remettrez cette lettre, cette tresse de cheveux et le journal de mon itinéraire, encore imparfait, à son adresse ? »
    « Je vous le jure sur ma parole d'honneur » Il ne la tint pas. Le paquet fut remis au conciliabule. Après plus de deux heures d'anxiété, naturelle quand on se trouve entre la crainte et l'espérance, une voix farouche se fit entendre de cette manière :
    «  Allons, officier, l'affaire est terminée ; amenez l'Inconnu ».
    On s'était contenté de lui demander ce qu'il faisait à Ettenheim et son nom. Savary se tenait appuyé près d'une fenêtre, examinant toutes les figures et répandant la terreur dans tous les esprits. On l'achemine vers l'abîme ; mais il ignorait entièrement la décision perverse ou plutôt de forme, puisque la fosse qui devait recevoir le corps du malheureux prince avait été creusée avant qu'il fût tiré de sa première chambre, par les gendarmes mêmes, chargés de l'escorter. (Il est à remarquer que le prince, depuis l'instant de son entrée au château jusqu'à sa mort et longtemps encore après, était désigné dans la correspondance sous le nom de « l'Inconnu ». Suivons l'auguste victime descendant dans les fossés. »
    « Où me conduisez-vous ? Est-ce à la mort ? Dites-le-moi. »
    Point de réponse. «  Est-ce aux cachots ? Autant vaudrait mourir. » Un soldat laissa échapper ces mots :
    « Aux cachots ! Non malheureusement. » Il n'en fallut pas davantage pour instruire le prince du sort affreux qui l'attendait. Le voilà près du précipice, trouvant une haie d'hommes armés prêt à faire feu. »
    « Ah ! C'en est fait de moi ! dit-il ; ne me donnerez-vous donc pas un prêtre ? »
    « Veux-tu mourir en capucin ? » répliqua, à ce qu'on croit, le colonel de gendarmerie (Savary). On veut lui bander les yeux ; il le refuse, en disant :
    « Les Condés n'ont jamais eu peur. Un français doit mourir en brave. »
    On insista pour lui bander les yeux ; il s'en défendit absolument, et il fléchit le genou, en disant : « C'est devant Dieu seul que je le fléchis. » Et il fit face au feu. Les balles meurtrières atteignent le cœur du prince héros. On s'empare de sa montre garnie, et de quelques lettres de change ; car il n'avait point d'argent. On mit son corps tout habillé, à moins qu'une redingote couleur d'olive n'ait été arrachée de son corps, qui est placé au pied de la tour à gauche du pavillon, directement sous la gouttière, sous la fenêtre du garde d'artillerie où habitait feu monsieur Germain, et sous un tas de décombres, le corps ayant été gardé sous peine de mort par le commandant et deux gendarmes qui se relevaient pendant près de deux mois, outre les sentinelles ordinaires. Il est impossible qu'il ait été enlevé, ni alors, ni dans la suite, où l'on sait, à ne pouvoir en douter, que les plus sévères précautions ont été prises à ce sujet. »

    <o:p> </o:p>La succession du duc d'Enghien.

    <o:p>  </o:p>78. Chodron à Contye.27 mars 1804.
    « Voici ce que j'ai pu savoir de la princesse sur les affaires de notre malheureux prince. Elle a chez elle une cassette qu'il lui a fait recommander avant de quitter Strasbourg ; mais il en a emporté la clef. La princesse dit qu'il y a de l'argent et des papiers assez importants. Il y a une autre cassette chez le prince qui contient aussi de l'argent : elle est sous le scellé, ainsi que les effets. Tout cela est en lieu sûr, chez un homme parfait où monseigneur logeait : rien ne s'égarera. Il y a quatre chevaux à l'écurie, qui ne sont pas de grande valeur : je crois qu'il faut les vendre le plus tôt possible. Les gens qui restent ici sont : Simon le cuisinier, trois palefreniers, et le petit polonais nommé Joseph, qui était second valet de pied. L'argenterie a été remise par Simon à la princesse. Quand à l'argent et aux effets de Jacques, son hôte, parfait honnête homme, les conserves ainsi que Jacques l'en a prié par un billet qu'il a trouvé moyen de lui faire passer avant de quitter Strasbourg. La princesse croît, sans en être sûre, qu'il y a 2000 louis de placés chez un négociant de Freiburg, que je connais et auprès de qui je vérifierai la chose à mon retour. Tout étant sous le scellé, et n'ayant aucune mission, je n'ai touché à rien. J'ai recommandé aux gens de rester tranquilles jusqu'à ce que monseigneur ait fait passer des ordres et prononcé sur leur sort.
    Dans un portefeuille saisi se trouve le testament du prince, qu'il a redemandé pour y ajouter quelque chose. Ensuite le portefeuille a été scellé de son cachet et de celui du commandant de la citadelle, et il a demandé qu'il ne fût ouvert que par le Premier Consul. Dans ce portefeuille se trouvent les billets de l'argent placé, à ce que croit la princesse. Elle assure qu'aucune des lettres des princes n'a été prise ; qu'elle en a brûlé une partie et conservé les autres. Mais la correspondance avec monsieur de Sarrobert, d'Ecquevilly, de Lanan, ainsi que celle du prince pour demander du service aux Anglais, sont entre les mains du gouvernement. Quand aux papiers de Jacques, on les dit en sûreté.
    Vous sentez, monsieur, qu'il est indispensable que monsieur le duc envoie promptement une procuration pour tout terminer. Jusque-là les gens et les effets resteront ici. Reste à savoir à qui il donnera cette procuration. S'il m'était permis de donner un avis, je crois que personne n'est plus en état que la princesse de remplir cette mission, par la connaissance qu'elle a des affaires du prince et des intentions qu'il peut lui avoir communiquées. D'ailleurs elle a la faculté de prolonger son séjour ici, tandis qu'aucun émigré ne peut y rester. J'offrirais volontiers mes services ; mais il est probable que, si je ne peux pas rentrer en France sans danger, comme il y a grande apparence, je serai expulsé de Freiburg, et Dieu sait où je pourrai aller pour me mettre hors de portée de la nation qui fait des arrestations partout. Et je cours d'autant plus de risques de l'être, que je suis inscrit sur une liste envoyée de Paris au préfet de Colmar, comme pensionnaire, avec la qualité de la place que j'occupais chez monseigneur. Tous ces émigrés sont bien à plaindre, si monseigneur n'obtient pas qu'ils seront protégés par un ambassadeur anglais dans l'endroit qui serait désigné. Sans cela, ils seront chassés de partout et ne sauront où reposer leur tête. J'ignore au surplus si la princesse voudrait accepter cette procuration. Je le crois ; mais je tâcherai de savoir, avant de fermer ma lettre, si elle se chargerait de cette pénible commission.

    <o:p>  </o:p>79. Contye à Chodron.19 avril 1804.
    « Je vais me borner aux intentions des deux pères. Ils ont fort approuvé toutes les démarches que vous avez faites, et me chargent de vous le dire. C'est une preuve d'attachement dont ils ne doutaient pas. Il faut donc, mon cher, qu'aussitôt la présente reçue, vous vous rendiez à Ettenheim, et que vous vendiez les chevaux, les voitures et tout ce qui a rapport à l'écurie ; de plus, le vin, le linge de table, enfin tout, excepté l'argenterie, que vous tâcherez de conserver. Quand aux cassettes, papiers et tout ce qui est sous scellé, on désire que vous y mettiez la plus grande surveillance, et que vous preniez toutes les précautions pour qu'il n'arrive rien à ces objets. Avant de faire cette opération, vous en ferez part à la princesse, et vous vous concerterez avec elle à cet effet. Il faut continuer de payer les malheureux serviteurs comme ils étaient avant. On vous enverra par le premier courrier des procurations et des instructions pour terminer tout cela. Les gens n'y seront sûrement pas oubliés. »

    <o:p> </o:p>80. Chodron à Contye.12 mai 1804.
    « Je crois vous avoir mandé que le bailli de Malhberg avait fait mettre le scellé sur l'appartement et les effets du prince. Ainsi vous devez sentir que je ne puis absolument rien faire sans avoir la procuration que je vous ai demandée. La princesse, à qui j'ai envoyé copie de votre lettre, pense comme moi sur cela. Comme vous m'annoncez cette procuration par le premier courrier, je l'attends de jour en jour avec grande impatience, parce que, dans la position précaire où nous sommes, il me tarde de mettre ordre à cette affaire. Aussitôt qu'elle me sera parvenue, je ne perdrai pas un instant pour remplir les intentions des deux pères, et je ne désemparerai pas d'Ettenheim que tout ne soit fini.
    L'argenterie sera conservée, comme on le désire, et mise en mains sûres si j'étais dans le cas de quitter le pays. Il me semble que je vous ai dit qu'une des cassettes est sous le scellé, et que la princesse à l'autre chez elle, d'après la prière que lui a faite le prince d'en avoir soin. Elle avait voulu me la remettre dans le temps ; mais je n'ai pas voulu prendre sur moi de la recevoir sans ordre. D'ailleurs elle est parfaitement en sûreté chez elle. Il faudra forcer ces cassettes, car le prince avait emporté les clefs avec lui. Je vous prie, monsieur, d'assurer les princes que je mettrai autant de soin que de zèle à exécuter leurs ordres : la reconnaissance et l'attachement m'en font un devoir. Vous avez vu par ma précédente que nous avions prévenu les intentions des princes en faisant vendre les chevaux, qui n'ont produit que 565 florins, faisant 1,233 L. 14 s. 6d.  aux cours de France. »

    <o:p>  </o:p>81. Chodron à Contye.4 juin 1804.
    « Je viens de recevoir à l'instant, monsieur le chevalier, votre lettre du 13 mai avec procuration qui y est jointe (Il était recommandé dans celle-ci à Chodron d'observer « le secret le plus absolu »), et je m'empresse de vous en accuser la réception, afin de vous tranquilliser à cet égard. Je suis extrêmement touché de la confiance dont les parents daignent m'honorer. Je ferai de mon mieux pour y répondre, et je crois que vous ne doutez pas que je serai toujours entièrement dévoué à la famille. Il n'y a pas de révolution qui puisse affaiblir un attachement de près de trente années, quand il est fondé sur la reconnaissance et sur les principes que vous me connaissez.
    Je partirai demain pour Ettenheim, et ne perdrai pas un instant pour remplir les intentions des princes sur tous les points. Ce sera avec un grand plaisir que je concerterai avec elle sur tout ce qu'il y aura à faire.  Cela est d'autant plus convenable, qu'elle connaît beaucoup mieux que moi les affaires de celui que nous pleurons, et ceux de ses gens qui méritent le plus d'égards. Je regrette qu'on ne vous ait pas autorisé à me prescrire plus positivement ce que je peux faire pour eux : d'abord, parce qu'ils peuvent trouver à se placer ; en second lieu, parce que je crains qu'on ne les souffre pas dans le pays, une fois que les affaires y seront terminées ; et enfin, parce qu'il est possible que quelques-uns d'entre eux veuillent rentrer en France. Quand je serai sur les lieux, je serai plus particulièrement instruit de leurs projets, et je verrai avec la princesse ce qu'il sera possible de faire à leur égard, s'ils désirent prendre tout de suite leur parti.
    Ceux qui restent à Ettenheim sont : Simon cuisinier, Chantepie, Colin, Benoist (frère de Poulain), palefreniers, et le petit polonais, qui faisait le service de second valet de pied.
    Ceux qui sont au pont couvert sont : Feron, valet de chambre ; Joseph, valet de pied, et Poulain, garçon d'office. On ignore encore quand ils pourront recouvrer leur liberté. Je vous ai mandé que le gouvernement leur avait assigné 30 sous par jour, et que la princesse avait trouvé moyen de leur envoyer des secours. Monsieur de Thumery est toujours à la citadelle, ayant autant de liberté que le lieu le comporte. La princesse, de qui j'ai reçu une lettre aujourd'hui, me mande qu'elle a reçu hier des nouvelles de monsieur de Grünstein, qui la prie de faire veiller sur ses effets ; qu'on ne croit pas que son sort soit décidé avant huit jours, et qu'on espère qu'il s'en tirera sans malencontre.
    Je vais vous transcrire un autre article de sa lettre, qu'il est très important que les pères sachent :
    « Je crois vous avoir mandé que Bonaparte s'était refusé à rendre toutes espèces de papiers, en répondant à la personne chargée de cette mission par le Roi de Suède, qu'il ne se mêlait ni d'affaire particulières, ni d'affaires de famille. Le hasard nous a mieux servi sur ce point. Quelqu'un qui nous est attaché, s'est trouvé connaître la personne chargée de ce dépôt ; il en a obtenu, non les dernières volontés, qu'il a dit être égarées, mais au moins les billets et lettres de change qui y étaient joints ; et ma belle sœur, qui doit venir incessamment, sera chargée de me les apporter. Ce n'est pas tout ce que nous aurions voulu ; mais ce sera au moins une facilité pour l'arrangement des affaires. »
    Cette nouvelle me fait d'autant plus de plaisir que je n'étais pas sans inquiétude sur les difficultés qu'on aurait pu me faire sur le paiement de l'argent placé, faute de représenter les billets. Il m'aurait probablement fallu donner une caution : c'était la moindre difficulté qu'on pouvait me faire. Il est fort heureux que la princesse ait eu des amis sur les lieux, assez intelligents pour recouvrer ces papiers. C'est un très grand service qu'elle a rendu aux parents. Il paraît que nous n'auront jamais le testament, qu'on aura cru devoir supprimer, parce qu'il contient peut-être des dispositions dont on ne veut pas instruire le public....
    Au surplus, je me conduirai avec prudence et discrétion. Comme on a assez de confiance en moi pour s'en rapporter à ce que je ferai, j'éviterai les formes judiciaires qui sont longues et coûteuses, et je ferai un inventaire privé en présence de la princesse, si toutefois je ne trouve pas de difficulté de la part du bailli. Enfin nous ferons pour le mieux, et vous serez exactement instruit de nos opérations... »
    <o:p> </o:p>*Monsieur Real a rendu les billets du duc d'Enghien, qui ont été apportés à Ettenheim vers le 15 juillet.

    <o:p>  </o:p>82. Contye à Chodron.26 juillet 1804.
    « Il faut garder les lettres des princes, et bien prendre garde que personne ne les voie ; et, en cas d'échauffourée, les brûler vous-même, ou monsieur Febvrel, à qui monsieur le duc de Bourbon donne sa confiance en cas que vous fassiez le voyage ; auquel vous laisseriez des instructions, et avec qui vous vous concerteriez pour tout. C'est entre bonnes mains : ce choix est parfait, et je l'ai fort appuyé, et ai dit à l'héritier (le duc de Bourbon) tout ce que le père (le prince de Condé) pensait à son égard. Le journal des voyages, les lettres du Roi et autres qui peuvent être intéressantes, de même que tout ce que l'infortuné peut avoir écrit sur la guerre, ses campagnes et autres choses de lui, il faut le conserver précieusement : cela est très recommandé par l'héritier (le duc de Bourbon). Pour les registres de mariage, baptême, morts de son régiment, mettez-les en sûreté, sans en faire un dépôt chez un notaire. C'est intéressant à conserver pour les familles. Monsieur Sautier peut les cacher quelque part.
    Les hôtes de Jacques ayant été très honnêtes, il faut biens les remercier de la part de l'héritier, et payer ce qui leur est dû :  de même que pour celui chez qui habitait le prince. Quand à Bronner, je lui parlerai, lundi, que je dois le voir ; il me paraît très honnête et très attaché. »
    <o:p> </o:p>* Le 7 juin, Chodron écrivait qu'il avait rencontré beaucoup d'obligeance chez le grand bailli de Mahlberg. Il avait assuré qu'il mettrait beaucoup d'intérêt à ce que la chose se terminât le plus simplement et le plus secrètement possible ; ce qui sera d'autant plus facile qu'il y a peu d'effets, puisque les meubles de l'appartement appartiennent au propriétaire de la maison.
    <o:p> </o:p>* Monsieur Febvrel était réfugié à Freiburg en Brisgau, lorsque Chodron rentra en France, en 1805, il lui remit en garde «  le portefeuille fermé de la succession de monseigneur le duc d'Enghien » Déjà monsieur Febvrel avait reçu de monsieur de Saint Etienne, un paquet cacheté, relatif à la comptabilité du corps de Condé.

    <o:p> </o:p><o:p> </o:p>83. Condé à Charlotte.9 août 1804.
    « J'ai reçu, madame, toutes vos lettres du 5 et 7 juin, ainsi que celle du 20 juillet. Je vous demande bien pardon si je ne suis pas aussi exact à répondre que je le voudrais ; mais cela ne m'est pas possible. Tout ce qui a rapport à l'horrible événement me déchire trop le cœur pour pouvoir tenir ma plume souvent et longtemps.
    Les affaires ne s'en traitent pas moins exactement, par la correspondance établie avec « l'homme » (Chodron), que vous avez vu et qui se loue beaucoup de toutes vos bontés. C'est à vous que l'on doit le renvoi de tout ce qu'on a pu tirer des griffes infernales qui tyrannisent la France : je vous en fais tous mes remerciements. J'ai été fort aise de voir Bronner, et l'homme était fort bien choisi : je lui rends toute justice.
    Le bruit dont vous me parler a beaucoup couru ici. Votre assertion contraire ne laisse plus aucun doute sur sa fausseté. (Les bruits de mariages entre Charlotte et le duc d'Enghien).Très certainement je recevrai avec bonheur (s'il en peut encore exister un pour moi) la copie d'un portrait ressemblant de celui qui m'était si cher. Je vous prie de la faire faire par un bon peintre. J'en désirerais même deux, une pour mon fils et une pour moi. « L'homme » paierait l'artiste. Mais quand cela sera fait, je voue prie de m'en donner avis et de ne me les envoyer que sur la réponse que vous recevrez de moi.
    Vous avez sûrement très bien fait de remettre au Roi de Suède tout ce qu'il a bien voulu désirer. C'est bien du fond du cœur que j'ai tâché de lui exprimer toute ma reconnaissance, et j'en ai reçu la réponse la plus sensible et la plus obligeante. Je vous remercie des détails que vous voulez bien donner sur la marche de cet intéressant et brave souverain. Je crois que, dans le temps qui court, il ferait bien de retourner chez lui.
    Je suis désolé de ne pouvoir rien faire pour le sieur Bonat, mais vous verrez par la note ci-jointe que cela m'est de toute impossibilité. Quand à l'autre personne, je vous prie de lui faire dire que je n'oublierai pas ses bons services, et que dans l'occasion je lui prouverai tout mon intérêt. En attendant, nous nous en rapportons à vous pour arranger avec « L'HOMME » la gratification dont vous le jugerez susceptible et qu'il peut lui payer. Son frère a la pension. Celle du nommé Guillon, dit la France, sera continuée par mon fils, que toutes ces choses-là concernent uniquement.
    Permettez à ma profonde douleur d'abréger cette lettre ; mais ce ne sera pas sans vous réitérer tous mes remerciements de tous les soins obligeants et désintéressés que vous avez bien voulu vous donner, et sans vous assurer de mon respectueux attachement.
    <o:p> </o:p>P. S. : Si vous en avez les moyens, je vous prie de faire dire à tous ces braves gens, qui se sont conduits avec tant de courage et d'honnêteté depuis l'affreux événement, qu'un de mes plus constants désirs sera toujours de me trouver en position de leur marquer mon intérêt et ma reconnaissance. J'envoie à « L'homme » les secours à faire passer aux malheureux qui sont loin de vous. (Ceux qui furent arrêtés en même temps que le duc d'Enghien).

      84. Chodron à Bourbon.5 septembre 1804.
    « D'après ce que monseigneur a mandé à madame Charlotte en faveur du brave homme qui a montré tant de zèle et de dévouement, elle a prié un de ses amis de tâcher de le sonder sur ce qu'il préférerait, soit d'un présent, ou d'une gratification en argent, qu'elle croyait, vu sa position et sa nombreuse famille, devoir lui être plus utile. Madame Charlotte me mande qu'il n'y a pas moyen de lui faire rien accepter qui ait quelque valeur ; qu'on le blesserait lui donner une marque de leur satisfaction, il désirerait un anneau sur lequel serait inscrit : « Prix de sa fidélité aux Bourbons ». Madame pense avec toute raison que cette réponse si noble, si touchante, si désintéressée, mérite plus, et que puisque les princes veulent bien s'en rapporter à elle, elle croit devoir lui faire faire une bague des cheveux qu'elle possède, sur laquelle seront gravés «  Prix de sa fidélité ». Cet honnête homme est digne de ce bienfait, et je ne doute pas que V. A. S. ne soit touchée de la délicatesse de ses sentiments.
    ..Lorsque madame Charlotte a mandé à V. A. S. que monsieur son père devait 12 000 livres à la succession, elle avait totalement oublié un billet particulier de 100 louis, souscrit par elle le 10 mai 1803, dont voici la teneur :
    « Je promets remettre à S. A. S. M. le duc d'Enghien, la somme de cent louis d'or de France, sur les premiers fonds qui tomberont à ma disposition, soit sur les revenus, soit sur la vente de ma part de l'habitation de Saint-Domingue. En foi de quoi j'ai signé la présente obligation. »
    Ce billet fut trouvé avec tous ceux que la princesse a reçu de Paris ; et c'est seulement alors qu'elle s'est rappelé son existence. En me l'envoyant en même temps que les autres, elle m'a chargé de prévenir V. A. S., en ajoutant que son intention était d'y faire exactement honneur. Cependant, je sais d'une manière indirecte qu'elle n'a pas touché la valeur de ce billet, qui avait pour cause un projet qui n'a pas eu d'exécution. J'ai cherché à la sonder sur cela : elle a toujours éludé toute explication.
    <o:p> </o:p><o:p> </o:p>*Une autorisation était venue de Londres, d'accorder tous les délais qui seraient demandés par la princesse Charlotte pour le remboursement de la somme de 12 000 livres, avancée à son père par le duc d'Enghien.
    <o:p> </o:p>Voici la liste des billets relatée dans la lettre du Premier Consul à Réal du 22 mars 1804.
    Elle comprenait :
    1° : 2000 ducats (environs 23 500 F), portant un intérêt de 6%%, remis le 17 novembre 1801 à monsieur Sautier ;
    2° : 7150 florins d'Empire (ou 650 louis), portant le même intérêt, remis au même le 13 décembre 1803 ;
    3° : 500 louis (12 000 F), remis au prince de Rohan Rochefort ;
    4° : 3850 florins d'Empire (ou 350 louis), remis à la maison Bouate et Mainoné ;
    5° : 100 louis remis à la princesse Charlotte ;
    6° : 300 louis, remis le 15 février 1803 à monsieur Salomon Dürr, de Lahr.
    <o:p> </o:p>Ainsi, en arrivant à Ettenheim, le jeune duc avait fait un premier placement d'environ 23 500 F, provenant sans doute des ses épargnes. À partir du 1° juin 1801, il avait touché une pension anglaise de 150 livres par mois, qui s'étant continuée pendant trente mois, jusqu'au 1er décembre 1803, avait monté à la somme totale d'environ 95 000F, déduction faite des pertes sur le change et d'autres frais. Le duc, avec sa vie simple et ordonnée, avait économisé presque la moitié sur cette somme et l'avait employée en placements et en prêts.
    Le montant de ce qui était représenté par les billets pouvait être évalué à environs 65 500fr. Il convenait d'y ajouter :
    1° environ 12 000 livres enfermées dans les deux cassettes (dont 11 780 dans la cassette confiée à la princesse Charlotte) ;
    2° environ 6250 livres provenant de la vente des effets du duc (dont 1232 F pour la vente des chevaux).

    <o:p>  </o:p>85. Chodron à Contye.17 décembre 1804.
    « Le retour de monsieur Jacques n'ayant pas été aussi prompt que celui des gens, j'ai fait un second voyage pour le voir, et j'en suis revenu hier soir. Je l'ai trouvé aussi bien portant qu'on peut l'être après une captivité de près de neuf mois. Son premier soin a été d'écrire aux princes ainsi qu'à vous. Je sais qu'il se plaint des mesures que j'ai prises lors de l'inventaire, relativement à sa caisse : mais ces mesures étaient commandées par les circonstances du moment, et par l'incertitude où nous étions sur son sort. J'étais certes bien éloigné d'avoir le moindre doute sur son honnêteté...
    De tous nos revenants, c'est le grand Joseph que j'ai trouvé le plus changé, à cause de la maladie grave qu'il a eue dans sa prison ; il a besoin d'un peu de repos pour se refaire. Vous jugez combien il est content et heureux d'aller vous joindre ; rien au monde ne pourrait l'en détourner... »
    <o:p> </o:p>P. S. : Jacques, conduit à Strasbourg avec le duc d'Enghien, avait été transféré à Paris à la fin de mars 1804, et enfermé à Sainte Pélagie, puis au Temple. Pendant plusieurs mois, on ignora à Ettenheim ce qu'il était devenu. Enfin, au commencement de septembre, la princesse Charlotte reçut de lui une lettre, disant qu'emprisonné avec Schmitt et les abbés d'Eymar et Weinborn, il était moins gêné qu'on pouvait le craindre ; que quelques personnes avaient la permission de le voir deux fois par semaine ; qu'il avait la certitude officielle qu'aucun chef d'accusation n'existait contre lui. Charlotte offrait au malheureux Jacques de venir auprès d'elle si rien ne l'attaché ailleurs. Enfin elle est bien occupée de lui et n'oubliera, dit-elle, jamais son dévouement si touchant et la conduite qu'il a tenue, et qui lui ont acquis des droits à jamais sur le cœur de Charlotte.
    Jacques, mis en liberté à la fin de novembre, était, comme on va le voir, resté quelques jours à Paris pour réclamer, mais vainement, le testament du prince.
    <o:p> </o:p>Jacques trouva bizarre la manière comment fut réglée la succession du prince, surtout à son égard. Au mois de juin 1804, comme il paraissait nécessaire d'établir la situation de Jacques vis-à-vis de la succession, le scellé apposé sur la chambre avait été levé, son portefeuille avait été visité par Chodron. Un certain déficit fut constaté. Jacques se montrait très irrité d'une sorte de perquisition faite chez lui en son absence, et qui avait découvert une irrégularité à un moment où il lui était impossible de se justifier.

    <o:p> </o:p><o:p> </o:p>86. Jacques à Contye.15 décembre 1804.
    « Vous m'avez toujours traité avec tant de bonté, que j'ose espérer que vous voudrez bien m'aider à remplir un devoir bien douloureux. J'ai osé écrire à leurs Altesses Sérénissimes :
    Je vous prie de leur remettre les lettres ci-jointes.
    Je me suis abstenu, pour ne point renouveler leurs douleurs, de rendre compte des derniers ordres que j'ai reçu verbalement de S. A. S. monseigneur le duc d'Enghien à la citadelle de Strasbourg, ne pouvant me les donner par écrit. C'est vous, monsieur le chevalier, que je supplie de se charger de ce triste et pénible devoir. Je n'entrerai dans aucun détail de cet affreux événement : vous les connaissez sûrement tous. Je me bornerai seulement à vous faire connaître les ordres que j'ai reçus.
    Arrivé à la citadelle de Strasbourg, j'ai eu la satisfaction d'être réuni à mon malheureux maître. Je ne l'ai point quitté jusqu'au moment où les barbares sont venus l'arracher au milieu de nous ; j'ai sollicité vainement à partager son sort. Il l'avait lui-même demandé ; mais ils s'y sont opposés d'une manière bien cruelle. Je passe sous silence le reste de cette scène douloureuse et bien chère à mon cœur. Le lendemain 16 mars, un commissaire du gouvernement et un officier de gendarmerie sont venus pour parafer tous les papiers enlevés. Monseigneur a exigé que j'y fusse présent. La chose étant terminée et les deux personnes retirées, il me dit : «  Je regrette de n'avoir pas demandé à brûler la reconnaissance du prince de Rochefort, et une autre de la princesse. Je regrette aussi de ne pas vous avoir fait lire mon testament ».Le lendemain, veille de son départ, il s'enferma avec moi pendant trois heures, en m'ordonnant de l'écouter attentivement. Je rapporte la conversation mot à mot. C'est S. A. S. qui va parler :
    « Je pense que leur intention est de me garder en otage ; que je serai conduit à Paris et que je pourrai vous avoir avec moi. Je vous promets de le demander, et j'espère qu'ils ne me refuseront pas. Schmitt sera sûrement mis le premier en liberté. Il ira à Londres voir mes parents et leur rendra compte de tout ce qui s'est passé, etc. »
    Un instant après, S. A. S. a continué :
    «  Cependant, si c'était à ma personne seule qu'ils en voulussent, il n'y a pas de doute que vous ne soyez mis tous en liberté et qu'on me refuserait la consolation de vous avoir avec moi. Dans ce cas, je vais vous donner mes ordres, et j'exige votre parole d'honneur que vous les exécuterez de point en point » ;
    Ce que je fis à l'instant.
    « Je veux par là vous engager, connaissant votre probité, afin qu'aucune considération ne vous retienne pour l'exécution de mes ordres. Vous savez que j'ai fait, il y a quelque temps, mon testament. Je regrette de ne vous l'avoir pas fait lire hier ; je me l'étais proposé, et c'est un oubli de ma part. En voici l'essentiel. Je donne tout ce que j'ai à la princesse Charlotte de Rohan Rochefort ; je la charge de différent legs pour mes gens, l'argenterie, que j'ai reçu de mon grand-père, sera rendue, ainsi que d'autres objets dont je ne me rappelle pas. Si le gouvernement revoie mon testament et lettres de créance, la première chose que vous devez faire sera de brûler la lettre de créance du prince de Rochefort, en tout cas de prendre les ordres de la princesse sur cet objet, de passer à son ordre les lettres de change ou d'en faire faire de nouvelles en son nom, afin de lui remettre tout ce que vous avez à moi, tant l'argent qu'en effets, et tout ce qui m'appartient. Si au contraire, mon testament et billets se trouvent égarés ou autrement, comme c'est vous qui avez placé mes fonds, il vous sera facile de les retirer et de les remettre à la princesse. Au surplus, vous prendrez ses ordres et ne ferez rien sans la consulter. Je vous recommande de lui donner tous vos soins. Vous me promettez qu'aucune considération ne vous arrêtera. Pour ma tranquillité, jurez-le-moi encore une fois » ; ce que j'exécutai à l'instant, etc.
    J'ai promis et j'ai juré d'exécuter les ordres ci-dessus. Que ma position est douloureuse, monsieur le chevalier ! Je sens que si je ne faisais pas mon devoir, je ne remplirais que la moitié de ma tâche, si, après avoir été fidèle observateur des ordres que j'ai reçus de mon auguste maître, je m'écartais de ce qu'il m'a donné pour être exécuté après sa mort. Ceux-ci impriment un caractère plus sacré, qu'on appréciera sans douter. J'ose donc espérer, monsieur le chevalier, que vous aurez la bonté de saisir un instant favorable pour mettre sous les yeux de S. A. S. monseigneur le duc de Bourbon les ordres ci-dessus, et que ceux que j'attends se trouveront conformes aux volontés de monseigneur le duc d'Enghien. En attendant, je garderai le secret avant d'en parler à la princesse.
    Après avoir recouvré ma liberté, j'ai eu la faculté de rester quelques jours à Paris. Je les ai employés à faire et à faire faire des démarches vers le gouvernement pour avoir le testament. J'ai eu une réponse favorable de Réal : il m'a fait dire que le gouvernement ne tenait point à conserver cette pièce ; que le premier instant de loisir qu'il aurait, il l'emploierait à la recherche de cette pièce et qu'il me la ferait passer... »
    <o:p> </o:p>* Henry Schmitt ne devait pas s'embarquer pour l'Angleterre. Sorti de prison en novembre 1804, dans le même temps que Jacques, il retourna comme lui à Ettenheim. Il y a appris qu'une pension de deux shillings et demi par jour lui était enfin attribuée.
    « Il ne me reste que cela pour vivre et faire subsister ma malheureuse famille, écrivait-il en avril 1805, ma longue détention m'ayant absolument ruiné, et même fait contracter des dettes auxquelles je ne sais pas quand je pourrai faire honneur ».

      87. Chodron à Contye.26 mars 1804.
    « Dès le moment de son retour, j'ai communiqué à Monsieur Jacques l'article de votre lettre du 26 juillet, par laquelle vous me faite connaître l'intention de monsieur le duc de Bourbon de se l'attacher sur le même pied qu'il était. Il vient de passer ici vingt-quatre heures, et j'ai eu lieu de croire qu'il était très sensible au silence que monsieur le duc de Bourbon a gardé à cet égard dans la lettre très honorable qu'il en a reçue ; qu'il était, aussi, affligé que vous ne lui en eussiez pas dit un mot. Sa longue détention, une maladie de presque trois mois, lui ont coûté des frais considérables, et, si j'eusse été autorisé, je lui aurais probablement fait plaisir de lui donner une portion de son traitement. Mais, délicat comme je le connais, il n'aurait rien accepté sans un ordre positif et je ne lui ai rien offert. Son dévouement, son zèle, son attachement pour son infortuné maître, et le courage avec lequel il s'est livré pour ne pas s'en séparer dans le plus dangereux des moments, lui donnent des droits bien réels aux bontés et à l'intérêt qu'on lui accorde. Il jouissait, outre la table et le logement, de 552 livres, dont une année est échue au 31 décembre dernier, et il y a eu un an dans ce mois-ci qu'il a été privé de la table.
    Rien de plus aisé, je l'espère, que de terminer les conférences d'affaires entre lui et moi. Nous y porterons l'un et l'autre le sentiment d'un devoir à remplir. Aucun reproche fondés ne seront faits. Il s'est laissé prévenir par des rapports mensongers et de misérables caquets, lorsqu'on ne prenait que des mesures de précaution, que le sort dont il était menacé semblait rendre indispensables. On lui a fait croire que son exactitude, sa fidélité avaient été suspectées, et il s'en est violemment aigri. J'ai eu beaucoup à souffrir de sa prévention, qui n'est pas détruite et que peut-être on a un peu aggravée en ne lui parlant pas de sa place de secrétaire des commandements de monsieur le duc de Bourbon. J'attends avec impatience la procuration annoncée, afin de voir dissiper ses inquiétudes... »
    <o:p> </o:p>*Chodron répondait de cette manière au passage suivant d'une lettre de Contye du 10 février 1805 : » D'après ce que vous avez mandé à l'héritier (Bourbon) et à moi, il ne peut exister le moindre douter sur la justice que vous avez rendue à monsieur Jacques, et qu'il mérite à tous égards. Aussi l'intention de l'héritier est-elle que vous vous concertiez avec lui pour terminer cette affaire, et que vous le mettiez bien au fait de tout ce que vous avez fait, afin qu'il vous remplace si vous partez. On lui enverra une procuration en vous envoyant votre congé. » Chodron, qui n'avait différé son retour en France que pour s'occuper de la succession d'Enghien, repassa alors la frontière et se rendit dans sa famille à Provins, où il devait mourir, le 1° août 1806. Il avait réussi à recueillir 42 000 livres, et, sur cette somme, avait envoyé successivement 15 000 livres au duc de Bourbon, le surplus ayant servi à acquitter les dépenses de la succession. Les créances qu'il laissait à recouvrer par Jacques, notamment celles qui sont sur la princesse Charlotte et sur son père, devinrent en grande partie irrécouvrables. Il est possible qu'en ne les réclamant pas, Bourbon ait pensé remplir suffisamment les dernières volontés de son fils envers la princesse.

    <o:p>  </o:p>88. Jacques à Contye.28 mars 1805.
    « J'ai reçu avec respect les ordres de monseigneur le duc, relativement aux dernières volontés de mon auguste maître. Je n'ai pas encore reçu la pièce qu'on m'avait promis de m'envoyer et que je vous avais annoncée. Je crains fort que je ne la reçoive pas de sitôt. Cependant, quelque temps après mon arrivée ici, on m'a mandé que cette pièce existait et qu'on avait tout lieu d'espérer qu'elle serait rendue. Mais, depuis cet instant, d'après les derniers événements qui viennent d'arriver à Paris, les personnes qui s'étaient chargées de cette négociation craignent justement de suivre cette affaire dans ce moment.  Je ne m'en suis pas tenu là ; j'ai intéressé une personne de ma connaissance, qui a quelque crédit dans une cour étrangère, d'en solliciter une autre qui a infiniment de pouvoir en France, pour s'intéresser à cette affaire. Celle-ci a tout promis et ne doute pas qu'elle n'aura une réponse favorable. Peut-être ferai-je un voyage pour solliciter moi-même d'un autre côté. Enfin je ne négligerai rien pour que cette pièce se retrouve.
    Les derniers événements dont je vous ai parlé ci-dessus sont que : vers le 10 de ce mois, un espion déguisé est venu à Rheinau, se disant envoyé de Poupart (la seule personne qui m'a donné des soins pendant ma détention lorsque j'ai pu communiquer), et par lui adressé aux messieurs Roesch, et assurant qu'il était recommandé à madame Charlotte et à moi. Quelques jours après, il en est arrivé un autre parlant le même langage que le premier. Ce dernier était un gendarme déguisé qui a voulu arrêter Roesch le jeune ; mais celui-ci l'a terrassé, cassé son épée, s'est enfui et a aussitôt passé le Rhin. Un instant après, la maison de son père a été investie par quinze gendarmes, la plupart déguisés, et les scellés ont été sur le champ apposés.  Heureusement que Roesch l'aîné et sa femme n'étaient pas à la maison, car ils auraient été arrêtés. Ils se sont évadés et sont en sûreté. Trois autres personnes ont été arrêtées et conduite à Strasbourg.  On ignore absolument la cause de cette mesure rigoureuse ; on présume seulement que, dans le temps, on a présenté une déclaration à Roesch, en lui offrant de l'argent pour la signer ; mais il a refusé parce qu'elle était contraire à la vérité. On assure de même qu'on voulait de nouveau lui présenter cette déclaration et, pour cet effet, s'assurer de sa personne ou quelqu'un des siens, pour l'obliger à la signer. Quelques jours après cet événement, j'ai appris que ce malheureux Poupart était déjà arrêté et conduit au Temple, lorsque le premier espion est venu à Rheinau, se disant envoyé par lui...
    D'après ces détails je crains que la remise de la pièce ne soit retardée, à moins que les autres moyens que j'ai tentés ne réussissent. Mais si, contre mon attente et malgré tout ce que j'aurai pu faire pour l'existence de cette pièce, elle ne se retrouverait pas, je vous supplie, monsieur le chevalier, de me faire connaître dans cette circonstance les ordres du prince et surtout de me mander comment je dois me conduire envers la princesse Charlotte ; si je dois lui dire ce qui m'a été confié à la citadelle, etc. Je vous supplie également de mettre aux pieds de L. A. S. tout mon dévouement respectueux, et que je n'aurai rien de plus à cœur que d'exécuter strictement, dans toutes les circonstances, les ordres dont elles daignent me charger...
    Je vous ai fait part de la position où se trouvent les deux Roesch et la femme de l'un : elle est telle qu'il est difficile d'en trouver une plus affligeante... Ils se sont tous trois évadés, n'emportant avec eux que ce qu'ils avaient sur eux. Madame la princesse m'a communiqué une lettre de monseigneur le prince, par laquelle elle est autorisée d'offrir une gratification à l'aîné. Celui-ci s'est contenté d'un objet de peu de valeur ; mais, dans la position où il se trouve, madame Charlotte a renouvelé ses offres, qui ont été acceptées avec reconnaissances. Au surplus, madame Charlotte doit écrire à ce sujet... »
    <o:p> </o:p>*Cette déclaration était vraisemblablement de même nature que celle demandée, paraît-il, à Canone. Cette déclaration devait consister à dire que le duc d'Enghien était venu en France au moins une fois depuis la Révolution.
    « Monsieur Roesch, écrivait à Chodron le 26 mars 1805, perd tout, état et fortune, pour s'être refusé à l'iniquité dont je vous ai parlé dans le temps. »

    <o:p> </o:p><o:p> </o:p>89. Contye à Jacques.22 avril 1805.
    « J'ai reçu, monsieur, les deux lettres que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, dont j'ai fait l'usage que je devais en les montrant à monsieur le duc de Bourbon, qui me charge de vous dire qu'il est toujours très disposé à exécuter les dernières volontés de son infortuné enfant ; mais il désire que l'on ait le testament pour les suivre plus ponctuellement. Tâchez donc de vous le procurer et faites tous vos efforts pour cela, et soyez sûr qu'après cela toute cette affaire sera bientôt terminée. On pense que vous ferez bien de ne parler de cela à personne, jusqu'à ce que vous ayez en main la pièce dont il est question.
    Vous verrez, par la lettre de monsieur le duc de Bourbon à la princesse, que ses dispositions à votre égard sont toujours les mêmes et que vous pouvez compter sur la place dont on vous a parlé de sa part. Il n'y a rien de changé en ce qui vous concerne ; mais je crois qu'il attendra encore avant de vous mander de venir le joindre, et vous devez bien en deviner la raison... »

    <o:p>  </o:p>90. Jacques à Contye.13 janvier 1806.
    « Lorsque je suis parti d'Ettenheim, je n'étais pas encore parvenu à faire rentrer toutes les créances qui avaient été avancées, par ordre de S. A. S., à différents particuliers, lesquels faisaient partie du montant de ma caisse. J'en ai confié le recouvrement à un honnête homme du pays, qui m'en rendra compte en temps et lieu, et, ce qui me restait d'argent comptant, je l'ai emporté avec moi. Et je m'étais bien proposé de ne pas toucher à ce dépôt ; mais les circonstances malheureuses où je me suis trouvé, m'ont forcé d'en disposer d'une faible partie, sans quoi je serais mort de misère. J'ai cru devoir, monsieur le chevalier, vous prévenir de cette infraction, afin que si on me demandait incessamment compte de ce dépôt, je pusse, par votre intercession, obtenir un délai pour remplacer ce que j'y ai enlevé.
    La princesse de Lorraine et la princesse Charlotte de Rohan sont ici. Je crois qu'elles se rapprocheront bientôt de Vienne. Je compte rester ici le reste de l'hiver, et j'attendrai les ordres qu'il vous plaira de me donner. »

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